Neuhauser-Lanzedelli : Foire en Transylvanie 1819 |
Il était une fois un pauvre homme. Un beau jour, il dit à sa femme:
«Ma chère femme, je vais à la foire pour vendre notre cheval.
-D'accord, fais comme tu veux!
-Au lieu de le vendre, je vais peut-être l'échanger. Je vais bien voir ce que je vais décider...
-Bon, d'accord, tu sais ce que tu fais. Tout ce que tu fais est toujours très bien.»
Ainsi fit-il. Il emmena le cheval comme il l'avait dit. En route pour la foire, il rencontra un homme qui allait, lui aussi à la foire. Mais celui-ci emmenait une vache. Le pauvre homme lui dit:
«Tu vas à la foire toi aussi?
-Oui c'est ça. Je veux vendre cette vache. Pour le prix que j'en aurai, je veux acheter un cheval.
-Hé là, l'ami, nous pourrions faire un échange!
-Bon, d'accord, j'accepte.»
Aussitôt dit, aussitôt fait, ils firent l'échange. Le pauvre homme en était content et il se dit:
«Ma femme n'arrête pas me dire que ce serait bien d'avoir un peu de lait à la maison.»
Il réfléchit quelques instants et se dit qu'il ne rentrerait pas tout de suite chez lui avec la vache mais qu'il ferait un tour à la foire. Sur la route, il vit un mouton qu'un homme menait au bout d'une corde. Il dit à l'homme:
«Où vas-tu, toi?
-Je vais à la foire pour vendre ce mouton.
-Nous devrions faire un échange. Ma femme me dit toujours que si nous avions un mouton, nous aurions de la bonne laine. Faisons un échange!»
Le maître du mouton accepta de bon cœur car une vache valait plus qu'un mouton. Un peu plus loin, il vit un homme avec une belle oie. Le pauvre homme lui dit:
«Hé, toi, tu veux vendre ton oie à la foire?
-Oui.
-Faisons un échange! Ma femme me dit toujours que ce serait bien d'avoir une oie. Elle pourrait picorer au bord de la rivière, elle donnerait des plumes et nous aurions des petites oies.
-D'accord, j'accepte!»
Ainsi fut fait. Il continua son chemin vers la ville et avant d'y arriver, il vit un homme qui avait une poule noire et blanche.
«Hé, toi, tu ne voudrais pas faire un échange? Ma femme me dit souvent que les poules noires et blanches sont les meilleures pondeuses. Ma femme n'arrête pas de rouspéter quand il n'y a pas d’œufs à la maison.
-Je suis d'accord!»
Bien sûr qu'il était d'accord puisque l'oie valait plus que la poule!
Le pauvre homme continua son chemin. Quand il arriva aux abords de la ville, il se dit qu'après tant d'échanges, il s'arrêterait bien pour boire un verre. Quand il entra dans l'auberge, il ne s'aperçut pas qu'un sac de pommes était posé près de la porte et il le renversa. Le propriétaire du sac se dirigea vers lui et l'apostropha:
«Tu ne fais pas attention et tu ne regardes pas où tu marches! Tu as fait tomber mon sac!
-Qu'est-ce qu'il y a dans ton sac?
-Il y a des pommes, je vais à la foire pour les vendre.
-Combien les vends-tu? Nous devrions faire un échange. Ma femme me dit souvent qu'elle ferait bien une tourte aux pommes mais elle n'a pas de pommes.
-D'accord, j'accepte!»
Le propriétaire du sac avait bien compris que la poule noire et blanche valait plus que le sac de pommes. Après avoir fait l'échange, le pauvre homme l'invita à boire un coup. Pendant qu'ils buvaient, il lui raconta tout le troc qu'il avait fait pendant la route: qu'il était parti avec un cheval qu'il avait troqué pour une vache qu'il avait troqué pour un mouton qu'il avait troqué pour une oie qu'il avait troqué pour une poule qu'il avait troqué pour les pommes.
Un peu plus loin, assis autour d'une autre table, trois commerçants buvaient un verre et entendirent ce que le pauvre homme venait de raconter.
«Alors quand tu vas rentrer chez toi, dirent-ils, ça va chauffer! Ta femme sera furieuse!
-Je ne crois pas parce que ma femme me dit toujours que ce que je fais, est toujours très bien.
-Nous voudrions bien voir ça!
-Si vous voulez, venez avec moi!»
Les trois commerçants parièrent entre eux un sac d'argent. Le pauvre homme, par contre, paria quant à lui, sa peau, car il n'avait pas d'argent. Les trois commerçants le raccompagnèrent chez lui. Deux témoins allaient également avec eux dont l'un était celui qui avait échangé le sac de pommes.
Quand ils arrivèrent à la maison, le pauvre homme entra avec le sac de pommes et dit à sa femme:
«Alors, ma femme, j'ai troqué le cheval pour une belle vache.
-Très bien, comme ça nous aurons du beurre à la maison.
-Attends, attends. Ensuite, j'ai troqué la vache pour un mouton.
-C'est encore mieux! Nous aurons toujours de la laine à la maison.
-Attends, attends ! Ensuite j'ai troqué le mouton pour une oie.
-C'est bien! Nous aurons au moins des plumes.
-Attends, attends. Je n'ai pas fini. Ensuite j'ai troqué l'oie pour une poule noire et blanche. Ensuite j'ai troqué celle-ci pour des pommes.
-Tu as bien fait! Justement aujourd'hui j'ai dû aller à la paroisse demander quatre pommes pour faire ma tourte. Mais le prêtre n'en avait pas. Maintenant c'est nous qui en aurons plus que lui. C'est bien mon cher mari, ce que tu fais, est toujours très bien.»
Elle prit son mari dans ses bras et l'embrassa. Les trois commerçants se regardèrent et laissèrent sur la table, sans dire un traître mot, le sac d'argent. Un pari c'est un pari!
Ainsi l'échange du cheval avait été profitable. De toute façon, il ne valait pas un sac d'argent, même pas un demi sac. Le couple eut ainsi de l'argent et du bonheur à la maison. Ils vivent encore aujourd'hui s'ils ne sont pas morts entre-temps.
Conte transylvain
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